The French edition (Hangar 84 and Painted Desert#1 in one book) with hard cover. 48 pages.
Les toutes jeunes éditions du Singe viennent d’inaugurer leur collection Atomic Stream avec la publication du premier volume de Painted Desert.
Cette bande dessinée est l’occasion pour le public francophone de découvrir un excellent dessinateur flamand, Lode Devroe qui n’avait jusqu’à présent vu qu’un seul de ses albums traduit en français de manière plutôt confidentielle, Le jour où la mer disparut aux éditions Bonte.
Les travaux publiés jusqu’ici par Lode Devroe dans plusieurs revues flamandes ou néerlandaises ont pour caractéristique commune de mettre en images des phénomènes étranges comme les ovnis et les extra-terrestres, sujets qui semblent le fasciner. C’est le cas ici aussi puisque les deux récits qui composent ce premier tome de Painted Desert, signés Pieter Van Oudheusden, évoquent une soucoupe volante écrasée au Nouveau Mexique non loin de la base aérienne de Roswell. De quoi combler les amateurs d’ufologie !
Même si elles ne sont pas facilement abordables, les aventures rassemblées dans Painted Desert méritent qu’on s’y intéresse de près car elles nous permettent de découvrir l’univers graphique d’un dessinateur de grand talent.
C’est donc avec plaisir que nous vous proposons ici un échange avec Lode Devroe – que nous remercions pour les illustrations qu’il a mis à notre disposition pour l’illustration de cette page – et son éditeur Patrick Verlinden qui nous a été précieux pour la traduction des réponses du dessinateur.
Nous espérons qu’ils vous inciteront à vous procurer, si ce n’est déjà fait, cette bande dessinée et à soutenir ainsi la collection Atomic Stream.
Entretien avec Lode Devroe :
Klare Lijn International : Painted Desert est votre deuxième bande dessinée publiée en français après Le jour où la mer disparut édité l’an passé par Bonte. Comment se fait-il que vos récits aient mis autant de temps à être publiés chez nous ? J’imagine que vous devez être très satisfait de toucher un nouveau lectorat.
Lode Devroe : Hangar 84 et Painted Desert #1 sont parus pour la première fois aux éditions Sherpa. En 2012, j’ai eu de graves problèmes de santé – j’ai perdu la moitié de mes facultés visuelles – suite à quoi la suite de Painted Desert a été retardée d’un an et demi. Pendant ma convalescence, j’ai retravaillé Le jour où la mer disparut que j’avais créé en 2005. C’est Patrick Verlinden qui m’en a donné l’occasion. Plus tard, il m’a proposé d’éditer une version française de Hangar 84 et Painted Desert #1 dans une nouvelle maison d’édition, les éditions du Singe. Entre temps, ma vision s’est améliorée même s’il ne m’en reste que 60 %. Je suis effectivement très content de faire mon apparition dans la « douce France ».
KLI : Votre dessin s’inscrit dans la tradition ligne claire et style atome. Pourriez-vous nous dire quelques mots sur votre parcours et sur le choix de ce type de graphisme ? Quels sont les dessinateurs qui vous ont particulièrement influencé dans l’affirmation de votre trait ? On ressent tout particulièrement l’influence de Chaland et Clerc.
LD : Avant de me consacrer uniquement à la bande dessinée, j’ai travaillé entre 1986 et 2001, pour une firme de textile qui produisait des étiquettes et des labels. J’étais créateur de labels et je devais produire des dessins pour des tissus, ni trop fins ni trop épais, de la taille d’un fil ! La technique du dessin style Atome vient de là.
J’étais également passionné par la collection Bulldog de Magic Strip. Mais aussi par Tillieux, Franquin,… Je suis un enfant de mon époque ! Par la suite, dans les années 1990, j’ai découvert l’œuvre de Charles Burns avec son atmosphère, sa manière de nous faire entrer dans un autre monde, je trouvais cela fantastique.
KLI : En dehors de la bande dessinée, on vous sent influencé par la série B américaine de science-fiction qu’elle soit filmée ou écrite. Quels sont les romans, films et téléfilms qui vous ont marqué ?
LD : The Twilight Zone. Weird classic B movies comme Invasion of the Body Snatchers … Ainsi que ceux moins connus : The Mole People, Them!, Wasp Women, Four Sided Triangle, World without End, Target Earth, The Thing that couldn’t Die, The Man without Body, The Man from Planet X, It came from beneath the Sea, The incredible shrinking man, The Day of the Triffids, Crack in the World, Children of the Damned, Attack of the Puppet People… Ce sont des titres qui incitent à l’imagination. Il ne faut même pas les avoir vus. Mais je ne m’inspire pas de ces films. Je trouve mes idées dans ce que je lis à propos de notre belle planète, le « real think » à propos des agroglyphes, des ovnis… écrit par des scientifiques ou des pseudo-scientifiques tels Jacques Vallée, Stanton Freedman, Julien Weverbergh, Jean-Pierre Petit, Edjo Haselhoff…
KLI : Presque tous vos récits mettent en scène des aliens et des ovnis. Comment se fait-il que vous ne consacriez qu’à ce type d’univers ? Avez-vous une ambition à travers vos créations ?
LD : En fait, mes bandes dessinées ne sont pas des histoires à propos des aliens mais de nous-mêmes. Je fais usage de métaphore face à l’inconnu. Personne ne sait ce qui se cache derrière les ovnis, d’où viennent les agroglyphes… Cela pourrait être notre cerveau qui se joue de nous, mais un jeu qui laisserait des traces physiques. Les ovnis, les agroglyphes mais aussi d’autres phénomènes ésotériques restent les plus grandes énigmes de notre temps. Cela remue pas mal de choses, provoque toutes sortes d’intérêts comme la beauté de la nature, notre passé oublié, le cosmos, notre comportement, qui nous sommes.
KLI : Il y a manifestement chez vous une forme de nostalgie pour une esthétique des fifties américaines. Quelles sont vos sources documentaires principales pour vous inspirer ? Est-ce que vous vous autorisez une certaine liberté dans la représentation des paysages, des voitures, des éléments de décor… ?
LD : Painted Desert #1 se passe en Arizona. J’utilise la plupart du temps des bouquins comme Time Life ou des vieux National Geographic. Les photos teintées azur sont plus évocatrices pour l’imagination que les clichés d’aujourd’hui. Je me suis par ailleurs entouré d’une collection de magazines auto, de vieux livres de science, de géologie, sur les ovnis et autres apparitions…
KLI : Je dois avouer avoir un peu de mal à rentrer dans vos bandes dessinées. Bien qu’offrant un graphisme vraiment intéressant, elles manquent à mes yeux de lisibilité. Avez-vous conscience de cela ? Est-ce voulu ? Pour ne pas être trop facile d’accès et imposer au lecteur une forme de concentration et un décalage dans la compréhension du récit ?
LD : Dans Hangar 84, tout s’enchaîne très vite. Il y a de grands bonds dans le temps qui sont proposés. C’est fait exprès pour donner un effet de surprise maximal à la fin de l’histoire. Painted Desert #1 est plus lent. C’est un road movie. Il s’agit de bien imprégner le lecteur dans les étendues désertiques de l’Arizona. Les versions originales en néerlandais de ces deux bandes dessinées étaient au format à l’italienne. La version française est donc formée par deux demi planches montées l’une sur l’autre. Le format à l’italienne correspondait très bien au désert, au roadmovie et au tempo de lecture que je voulais.
Ces récits – surtout Hangar 84 – sont métaphoriques et ne doivent pas être pris au comptant. Le sujet principal de Hangar 84 n’est pas Max l’alien mais la faiblesse de l’être humain, l’opportunisme du Dr Dia, le choix malheureux de Cynthia Lee Miller de transplanter un fœtus alien dans son propre corps. Ce ne sont pas des bandes dessinées pour enfants, ni des films de série B mais des récits critiques à propos de l’homme, amenés de façon trompeuse par un dessin ligne claire / style atome.
KLI : Un deuxième volume de Painted Desert est annoncé. Quand sera-t-il publié ?
LD : La suite est prévue pour l’année prochaine. Les planches sont pratiquement prêtes. Je suis occupé à la conclusion. Cela devrait être publié en français en 2016.
KLI : Avez-vous déjà développé votre univers en sérigraphie ou portfolio ? Est-ce que la création d’images isolées vous donne autant de satisfaction que la réalisation d’une bande dessinée ?
LD : J’aime autant créer des illustrations que de la bande dessinée, bien qu’il y ait plus de vie, plus de profondeur dans cette dernière. Pour l’instant, je suis concentré à 100% sur la bande dessinée. A ce jour, par exemple, je n’ai dessiné qu’un seul ex-libris de Painted Desert.
Entretien avec Patrick Verlinden, l’éditeur :
Klare Lijn International : Quelle est votre ambition avec la collection Atomic Stream ?
Patrick Verlinden : L’ambition d’Atomic Stream est de consacrer une collection au style atome, ce qui n’a plus été fait depuis la collection Atomium de Magic Strip. Malgré les années qui passent, le style atome est toujours présent dans la bande dessinée – le dernier Spirou dessiné par Schwartz, L’Empire de l’Atome de Smolderen et Clérisse, bientôt le nouveau Lapone… – mais il est rare et donc précieux !
KLI : Quel est votre parcours dans l’édition ? Etes-vous un amateur de ligne claire et de style atome ?
PV : C’est la première fois que je me frotte à l’édition. Auparavant j’ai écrit quelques livres fantastiques et quelques scénarii de bande dessinée. Dernièrement j’ai retrouvé les histoires d’un auteur de bande dessinée, Marc Lumer, publiées il y a 20 ans dans Spirou, du pur style atome. J’ai rassemblé ces histoires et écris une intro : Trois aventures atomiques de Salomon Barkowitz, publié chez Peter Bonte en français et néerlandais. Avant cela, j’avais publié Club Roswell et Club Colonial chez lui.
L’année prochaine est prévu Club Spoutnik avec un atomiste inconnu, Fratoom. Je prévois aussi de sortir un livre consacré au style atome.
KLI : Quels sont les prochains albums que vous comptez publier ? A quel rythme ? Est-ce que vous travaillerez surtout sur des traductions françaises d’oeuvres néerlandaises ou flamandes ? Ou bien proposerez-vous aussi des créations originales ?
PV : Pour l’instant, une bande dessinée par an est prévue dans la collection Atomic Stream. Cela dépendra des résultats de vente du premier Painted Desert. La suite sera bien sûr publiée. Lode travaille encore dessus. Dans nos cartons, nous avons aussi un auteur néerlandais et un auteur canadien. Il n’est pas exclu de publier un jour un auteur francophone. Pour l’instant, nous nous limitons aux textes inédits en français.
KLI : Signalons aux collectionneurs qu’une édition spéciale de Painted Desert (numérotée et signée avec jaquette) est annoncée. Est-ce que ce sera également une caractéristique de la collection ? Proposer des tirages limités accompagnés de bonus ?
PV : Le tirage limité de Painted Desert était effectivement prévu mais il n’a pas encore été créé. Nous attendons le feedback des lecteurs et des ventes… Nous serons présents avec nos auteurs aux festivals de Bruxelles, Quai des Bulles, Snef en bulles et l’année prochaine à Angoulême !
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